Exposition Eija-Liisa Ahtila
« Mondes parallèles »
Carré d’art-Musée d’art contemporain
Place de la Maison Carrée, Nîmes
Du 12 octobre 2012 au 6 janvier 2013
Alice aux pays des rennes (une traversée de l’espace-temps)
Avec les travaux d’Eija-Liisa Ahtila, artiste finlandaise connue
internationalement, on aborde un domaine qui mixe la vidéo avec la notion d’environnement.
En effet avec la disposition de plusieurs écrans, le spectateur circule dans ce
nouvel espace défini par les sons et les images. Il participe ainsi à la construction
d’un lieu participatif qui l’oblige à être partie prenante dans la perception de
l’œuvre.
Comme son titre l’indique, « Mondes parallèles », une coproduction
de Carré d’Art avec le Moderna Museet de Stockholm et le Musée Kiasma
d’Helsinki, travaille sur les différents états de perception au travers de 6
installations vidéos, de sculptures et de dessins. La vidéo nous pose toujours la
question de la référence à la fiction et de l’autonomie d’un art par rapport à
son aîné, le cinéma. Une interrogation qui demeure toujours d’actualité malgré
l’extrême banalisation de cette pratique artistique.
Avec L’Annonciation (2010), Eija-Liisa
Ahtila intervient à la fois dans le domaine de la performance, de la peinture,
du cinéma et de l’histoire de l’art (Fra Angelico par exemple). Tournant avec
deux actrices professionnelles, elle a fait appel à des amatrices recrutées par
l’Institution des diaconesses à Helsinski. Le paysage glacé permet un
déplacement d’avec les scènes peintes de la peinture italienne ou les paysages
de Palestine. L’ensemble repose sur des niveaux de perception multiples, optant
pour une forte distanciation d’une part, puisque l’on assiste aux travaux
préparatoires des actrices mais aussi à une somptueuse reconstitution de ce
moment clé de la pensée chrétienne. Il existe un jeu théâtral sur et avec le
sacré au travers d’une relecture très interrogative. La présence d’animaux
réels (l’âne et les pigeons) et symboliques (figurantes masquées) traduit la
participation du monde non humain à cet événement. Deux notions en apparence
contradictoires se heurtent fortement, le kitsch et le sublime, finissant par définir
une approche très ouverte.
D’autres œuvres animées questionnent également les préoccupations du
regardeur. La Maison (2002) où une
femme entend des voix intérieures qui perturbent gravement sa réalité. Ou
encore Horizontal (2010) qui présente
sur six écrans un épicéa, non pas de façon attendue, à la verticale mais de
façon horizontale, d’où le titre de la vidéo, en conservant un modérateur
d’échelle à son pied. Il s’agit d’une leçon de peinture par le biais du
bruissement des images légèrement mouvantes. Ainsi le changement du point de
vue influe sur la perception générale du sujet. La notion évidente de nature s’estompe
et oblige à réfléchir à la « Stimmung » (Georg Simmel) de cet arbre
au travers du paysage qu’il nous offre. Entre réflexion et contemplation. Eija-Liisa
Ahtila se réfère souvent à l’« Umwelt » de Jakob von Uexküll et à sa
mise en lumière de la superposition des mondes. Sa transposition dans le monde
de l’art contemporain favorise des décisions hétérodoxes qui poussent l’artiste
à explorer les frontières d’un monde brouillé.
Christian Skimao
Christian Skimao
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