Exposition Palazzo d’Eva Jospin
Palais
des Papes, Avignon
Du 30
juin 2023 au 7 janvier 2024
Eva Jospin, Côté Cour Côté Jardin, recto, Avignon, 2023.
Du
baroque chez les Gothiques
Eva Jospin réalise de plus ou moins fragiles édifices de carton qui semblent provenir d’un temps imaginé bien que référencé. La présence de ses diverses créations aux tailles multiples joue sur la délicieuse confusion entre la présence de la vieille pierre du Palais des Papes et cette matière qui la mime si bien. Ainsi, la notion de ruines irrigue également un théâtre des ombres où l’Histoire rencontre des histoires. Le parcours nous conduit de pièces assez petites comme la Grotte (2023) ou la Forêt Corinthienne (2023) jusqu’aux trois monumentales sises dans la Grande Chapelle, Côté Cour Côté Jardin (2021), Nymphées (2022) et le Cénotaphe (2020), vu à l’Abbaye de Montmajour, près d’Arles, à l’époque. Cette délicieuse frustration au niveau de la taille des œuvres et de leur perception n’empêche en rien leur totale intégration dans un parcours de type patrimonial.
Ce qui est grand impressionne fortement, souvenons-nous de la parole de Matisse : « Un centimètre carré de bleu n’est pas aussi bleu qu’un mètre carré du même bleu. » Pour Côté Cour Côté Jardin, le titre reprend bien sûr la dénomination des entrées d’une scène de théâtre. D’un côté, se trouvent le palais, la place et les colonnes qui symbolisent la ville policée, de l’autre une forêt aux lianes enchevêtrées et des grottes aux recoins sombres qui évoquent un monde mystérieux. Évidemment, l’action se déroule entre les deux, cette dichotomie apparente relevant du jeu d’acteurs invisibles. Avec Nymphées, nous nous dirigeons vers les fontaines de la Rome antique, à la fois réinterprétées par le jeu de cascades figées et l’utilisation de la lumière. Enfin le majestueux Cénotaphe, pour mémoire un tombeau élevé à la mémoire d'un mort et qui ne contient pas son corps, emprunte aux codes architecturaux du 18ème siècle et nous offre une sorte de pause spirituelle avec un léger pas de côté.
Si l’artiste utilise en plus du carton, du bois, des pierres, des coquillages, des fils, etc. elle ne néglige pas une approche de la tapisserie avec trois grandes pièces issues de Chambre de Soie. Ces broderies aux motifs minéraux et végétaux s’épanouissent sur les murs du Grand Tinel, jouant avec le temps passé et l’extrême modernité. Enfin une réalisation très particulière Empyrée (2023), sorte de faux lustre en laiton avec des breloques en verre, se trouve suspendu dans l’espace et semble, par le jeu de la perspective, vouloir s’évader. Accompagné de deux balcons extrêmement ensauvagés, l’ensemble donne le tournis.
Eva Jospin, nouvelle magicienne, transforme notre
relation aux œuvres, entre recréation et récréation. Elle invente des
narrations subtiles, fait bouger les codes et insuffle un esprit aux objets
inanimés, qui finalement avaient une âme.
Christian Skimao
Eva Jospin, Côté Cour Côté Jardin, verso, Avignon, 20223. |
Exposition Contre-Monde d’Eva Jospin
Collection
Lambert, Avignon
Du 1er
juillet au 17 septembre 2023
Se tient en parallèle, une autre exposition
d’Eva Jospin, au sous-sol de la Collection Lambert. Intitulée Contre-Monde,
elle présente d’autres aspects de la créatrice dont des vidéos et des dessins.
On retrouve bien entendu ses sculptures et ses fameuses forêts qui nous
entraînent dans cet espace onirique où le vrai s’éprend du faux.
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