mercredi 7 juin 2023

Exposition Ana Mendieta, "Aux commencements", MO.CO. Panacée, 2023.

 Exposition Ana Mendieta, Aux commencements

MO.CO. Panacée, Montpellier

Du 3 juin au 10 septembre 2023

 



 

                                    8 septembre (1985-1948)

 

 

  Une artiste dont l’existence s’est brutalement arrêtée le 8 septembre 1985 demeure pour toujours une énigme. Son œuvre se trouve alors comme figée, avec en filigrane la question de savoir ce qu’il aurait pu advenir par la suite. Les possibles demeurent en gestation et il nous reste à scruter ce qui a été accompli avec un intérêt teinté de mélancolie.

  Ana Mendieta, cubaine et américaine, nous apparait aujourd’hui comme une artiste très active, volontaire, inspirée, féministe, en phase avec de nombreux courants de son époque et qui nous concernent encore. Elle a beaucoup exploré les chemins (de traverse) de l’art et de la nature pour créer des environnements où le corps de la femme, dont le sien, joue un rôle primordial. Sculptrice, performeuse, photographe, cinéaste, elle a été une créatrice éclectique, repoussant limites et conventions pour revenir à des origines liées aux recherches archéologiques et initiatiques du monde mexicain, sud-américain et caribéen (réinterprétation de pratiques anciennes comme la Santeria, d’origine africaine et redevenue très importante à Cuba)

  À ses débuts, elle pratique une peinture inspirée par l’art précolombien et mésoaméricain. Puis vinrent ses fameuses séries de « Siluetas » avec de nombreuses variantes. La première se trouve réalisée au Mexique en 1973, une silhouette sur la plage, remplie de pigments rouges qui se trouveront par la suite emportés par la mer. Elle va continuer avec ces formes, privilégiant le creux au plein et mettant en évidence la présence du corps féminin par rapport à la terre. Son approche du Land Art, se différencie totalement à l’époque d’une approche mécaniste et bétonnée (comme celle de Michael Heizer) ou même des traversées pédestres de Richard Long. Elle met en place un système de réappropriation qui englobe du vivant dans le vivant, dans un rapport lié à la notion d’éphémère. Bref, une approche excessivement actuelle pour nous au 21ème siècle. Une tentative de réinterprétation d’un environnement, daté de 1978 à New York et réalisé à nouveau en 2023 à Montpellier, prend place ici, avec des différences liées aux éléments présents dans chacun des lieux. Il s’agit d’une silhouette allongée dans une forêt, se confondant peu à peu avec elle, en un principe d’osmose.




  Pour terminer, des séries de sculptures rupestres, d’une grande puissance, ont été réalisées à Cuba, lors d’un retour sur l’île, en 1981, dans les Escaleras de Jaruco. Gravées sur les parois d’une grotte elle les nommera des noms de divinités taïnos (peuples « premiers » de l’île) comme Lyare, Maroya, Bacayu ou Guanaroca. Divers films jalonnent aussi l’exposition, montrant des performances où l’artiste se met en action suivant ses procédures fétiches.

  Une œuvre à découvrir pour beaucoup d’entre nous, à approfondir pour les autres, dans tous les cas à interroger pour notre futur.

                                                                                                                                         Christian Skimao

 

Aucun commentaire: