vendredi 18 juillet 2025

Exposition Peter Fischli, LUMA Arles, 2025

 

Exposition Peter Fischli, People Planet Profit

Les Forges, LUMA Arles

Du 5 juillet 2025 au 11 janvier 2026

                             

Peter Fischli, entrée de l'installation People Planet Profit, vue partielle, LUMA Arles, 2025

                           Sens plus ou moins interdits

 

 

Cette exposition de l’artiste suisse Peter Fischli (membre du célèbre duo avec David Weiss, ce dernier disparu en 2012) occupe un grand espace pour explorer certaines phases du capitalisme mondialisé, une démarche souvent déclinée par bien des artistes contemporains. En se servant des images de son téléphone portable, toujours aplaties, l’artiste nous propose une exploration d’une réalité sise sous le signe du simulacre.

 

  Dès l’entrée, des photos en noir et blanc, imprimées sur un revêtement de sol en vinyle (Vertigo Vinyl Floor Pattern) tapissent le sol tandis qu’une grande installation de feux de circulation, plus ou moins désaffectés, avec deux couleurs seulement (blanc éclatant et jaune citron) s’allument et s’éteignent, présentant métaphoriquement la marche du monde, au travers des potentialités d’un parcours balisé. L’ensemble fait songer à ces parcours de laboratoire où de malheureux rats courent vers une hypothétique récompense. D’emblée, le sens de la marche peut entrer en contradiction avec le sens de sa vie. Le long de l’escalier menant à l’étage, une œuvre nommée Trackless Train, composée d’ images sérigraphiées et répétitives, contrecollées sur aluminium, d’un train touristique rose, en deux dimensions, mais avec des pneus, nous emporte visuellement dans une visite touristique connotée.

 

  Cette vision d’une ville connectée, dite « augmentée », ressemble de plus en plus à notre contemporanéité. Pourtant l’effet de déréalité joue à plein à cause de l’omniprésence des images inventées provenant d’un mille-feuille numérisé. L’enchevêtrement offre un sentiment apaisant d’épaisseur, tandis que la circulation permanente des capitaux, des humains, des représentations, du décor urbain, des désirs, des idées (?), ouvre le plus souvent sur un vide abyssal. Curiosité, fascination et perplexité composent ainsi une trilogie questionnante. À l’étage, une énorme présentation de 462 couvertures d’ouvrages, devant permettre à des débutants n’y connaissant rien, de s’enrichir rapidement grâce à la connaissance ultra-rapide du monde des affaires. Ces représentations usent de stéréotypes et se trouvent parfois retouchées par l’artiste (People Planet Profit). Reposant sur le concept entrepreneurial de « triple performance », Fischli convoque un modèle qui cherche à élargir les critères de succès des entreprises, en y incluant le bien-être social et la durabilité environnementale, en plus du profit, tout en se demandant si cela paraît vraisemblable ou appartient à la doxa affairiste.

 

Peter Fischli, People Planet Profit, couvertures d'ouvrages, vue partielle, LUMA Arles, 2025


  Pour continuer le débat, l’Histoire nous propose toujours des références, comme « Le Cauchemar climatisé (The Air-Conditoned Nightmare), titre d’un récit célèbre d’Henry Miller, qui offrait au lecteur des années 1940 une vision critique de l’American way of life . Aujourd’hui l’adjectif « numérisé » a bien détrôné « climatisé », quoiqu’avec la nécessité de rafraîchir en permanence les énormes serveurs des bases de données, un nouveau « cauchemar » reste à écrire.

 

                                                                                                                                                   Christian Skimao

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