mercredi 4 avril 2012

Exposition Francesca Caruana « Lignes d’eau »





Exposition Francesca Caruana « Lignes d’eau »
à Sète (Centre Régional d’Art Contemporain, Chapelle Haute, et deux installations in situ
« l’îlot de Robinson » et « S. eau S. » )
Du 15 au 30 mars 2012

  

                                             Une vague déferlante     



   Avec ces quatre interventions réalisées à Sète par Francesca Caruana dans le cadre du 6ème Forum Mondial de l’Eau nous nous trouvons en face d’une approche artistique polymorphe qui joue avec les lieux et les moyens d’expression tout en respectant la thématique fixée, celle de l’eau. Cette dernière se trouve mise en évidence par son contenant même dans le hall d'entrée du CRAC grâce à la constitution d’une ligne sinusoïde avec des bouteilles vides, colorées et enfilées sur un câble tandis qu’un lourd parallélépipède composé de plus de 200 bouteilles vides elles aussi lui répond. La présence entêtante du plastique indestructible, de sa volumétrie et de sa mise en espace répond par la négative à la présence, ou plutôt à l’absence du liquide vital. La rareté du produit se trouve ainsi mise en lumière par une esthétique de la récupération.

  Deux installations optent pour une forte présence en naviguant avec les contraintes portuaires. La première nommée « S. eau S. » au dock Richelieu se compose de bouées de plage de grand format tandis que la seconde intitulée « l’îlot de Robinson » est constituée par un radeau avec un arbre mort, une chaise longue, un parasol, et des objets divers dans des couleurs artificielles. Cette représentation d’une des inventions littéraires occidentales les plus fantasmées (de Daniel Defoe à Michel Tournier) nous plonge dans des considérations tant plastiques que référentielles. Il existe dans l’œuvre de Caruana le souvenir d’une absence et la mise en perspective d’un jeu enfantin qui offre une nouvelle perspective conceptuelle à l’interprétation de son éphémère monument.

  Enfin avec la Chapelle Haute nous nous trouvons en présence d’une monstration en apparence plus traditionnelle mais qui possède un fort pouvoir séducteur. Le génie du lieu offre d’emblée une plus value pour les œuvres exposées. Au centre se trouve une ingénieuse installation de petits aquariums remplis d’eau, avec le liquide allant du sale au limpide en passant par tous les stades possibles. Il ne s’agit cependant pas d’une démonstration didactique mais d’un questionnement amenant de l’évidence à la grâce. La série des « Buvards d’eau » joue sur l’imprégnation et la représentation picturale. Divers éléments proches de l’univers de l’artiste (os, rostres d’espadon, crânes de lapin, vertèbres de mouton,…) se trouvent réagencés pour entrer dans la définition même du sujet. La construction de lignes d’eau à partir de restes tangibles peut surprendre dans un premier temps. Pourtant cette contraction-dilatation des ingrédients naturels participe à l’élaboration savante d’une poétique qui transcende les genres établis.

  Partant d’une contrainte donnée l’eau , Francesca Caruana en décline avec inventivité les caractéristiques les plus secrètes. Elle affine notre perception du précieux liquide au travers d’une approche contemporaine qui magnifie la souveraine puissance du mythe.


                                                                                             Christian Skimao

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