lundi 7 mai 2018

Wolfgang Tillmans « Qu’est-ce qui est différent ? » Carré d’art-Musée d’art contemporain,Nîmes


Exposition Wolfgang Tillmans
« Qu’est-ce qui est différent ? »
Carré d’art-Musée d’art contemporain
Place de la Maison Carrée, Nîmes
Du 4 mai au 16 septembre 2018


"Paper drop Oranienplatz, c. "2017  Wolfgang Tillmans.
Courtesy Galerie Chantal Crousel et Galerie Buchholz, 


    
Faux-vrai ou vrai-faux ? 


  Pour une fois, débutons avec le catalogue de l’exposition qui reprend en français une parution d’où provient le titre de l’exposition. Wolfgang Tillmans a été invité comme rédacteur en chef par l’Association des arts et de la culture de l’économie allemande (« Kulturkreis der Deutschen Wirtschaft ») qui s’occupe d’un important projet annuel de théorie (« Jahresring »). Voilà une publication qui semble, en effet, bien éloignée des problématiques de l’art contemporain et pourtant elle permet à l’artiste d’évoquer ses points de vue avec des invités sur des problématiques relevant conjointement des domaines éthiques, esthétiques, sociologiques, et même politiques.
  Au niveau des œuvres présentées, le choix a porté sur des productions récentes comme « Vapeur » de 2017, mais aussi de plus anciennes, comme « Springer » de 1987. Les images proviennent de magazines, de clichés réalisés par l’artiste et aussi de la source inépuisable que représente internet. Au niveau des portraits existent de nombreuses œuvres qui interrogent le monde sur les relations, soit amoureuses, soit sociales, mais aussi sur les difficultés subies par les minorités tant sexuelles qu’ethniques. Le sexe n’est pas toujours si libérateur car le regard de l’Autre peut changer la nature profonde de chaque image, la dénaturer en quelque sorte.  
  Si l’interprétation demeure une source de malentendus, l’artiste a développé depuis 2005 les « Truth study center ». Il s’agit de tables où sont présentées des photocopies d’information erronées provenant de la presse mondiale avec des textes théoriques. Ces compositions permettent une collision entre le monde politique et l’univers photographique personnel. La frontière devient de plus en plus mince entre un réel supposé, son analyse et sa potentielle représentation. Rien ne sert de courir après les lubies de l’époque, seule compte l’analyse
  Retour à une vision plus esthétisante avec la somptueuse série « Paper drop Oranienplatz » de 2017 qui achève le parcours muséal à Nîmes. Le rapport existant entre la feuille de papier qui donne la forme de la goutte ainsi que la référence géographique de cette place berlinoise de Kreuzberg où de nombreux réfugiés ont séjourné, nous ouvre des horizons nouveaux. Tous les possibles se trouvent présents et absents à la fois, cachés ou révélés.
  Le travail plastique et politique au sens large de Wolfgang Tillmans questionne les fondements même de notre système de perception. À l’heure des « fake news » érigés comme vérité, se pose la question du sens critique. Sa disparition (Mais existait-il davantage autrefois ? On peut en douter au regard des idéologies du 20ème siècle) conjuguée avec la notion de « Backfire effect » (« Retour de flamme ») qui définit une attitude psychologique selon laquelle un individu reste convaincu de la véracité d’une affirmation malgré le fait qu’elle soit totalement fausse, propose de nouvelles manipulations. Et le jugement de l’Histoire dans tout ça ?                                                                                                             Cristian Skimao


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