Exposition Georges Tony Stoll « Le
destin du Minotaure»
Collection Lambert (musée d’art
contemporain), Avignon.
Du 13 mars au 6 juin 2022
Oeuvres diverses de Georges Tony Stoll, exposition Collection Lambert, 2022. |
Regards croisés dans le Labyrinthe
Cette exposition monographique ne se présente pas comme une rétrospective. Elle prend en compte l’interpénétration des différentes pratiques artistiques puisque Georges Tony Stoll, créateur aux multiples facettes, propose une mise en regard croisé de ses peintures, photographies, sculptures, dessins, collages, œuvres sonores. Une circulation à l’intérieur d’un labyrinthe personnel où la figure (dé)voilée d’Astérion sert de fil conducteur par le biais d’une photographie de 1997, Le Minotaure, placée à la fin de l’exposition, mettant en lumière actions du temps passé et ambitions renouvelées de l’artiste. Sans Ariane et sans Thésée qui s’évanouissent, le laissant seul sur papier argentique. Borges nous avait déjà mis en garde sur les trompeuses apparences, dans sa très courte mais époustouflante nouvelle, La demeure d’Astérion, où l’inversion des rôles entre « monstre » et « rédempteur » redéfinit le champ sociologique pour aboutir à une lecture mythologique différente.
Dans une approche très personnelle entre œuvres et sentiments, l’artiste a placé des peintures de sa série Paris-Abysse, à la fois oniriques et faussement réalistes, avec des photographies comme Les affranchis (1995). Les visages se trouvent toujours dissimulés, en tout ou partie, mettant en scène des corps activistes ou d’étranges apparitions venus de l’inconscient comme The Terrific Man (2002). Des sculptures en bronze parsèment l’espace comme Sculpture 3 (2021) ou encore une représentation stylisée du virus du sida, mais d’autres matériaux se trouvent également utilisés comme ceux composant ses tableaux en laine dont Identification absurde 111 (2019). Une installation sonore perturbe nos sens dans l’une des salles alors que dans le couloir, s’étale une grande peinture à trois larges bandes reprenant les couleurs primaires (magenta, cyan et jaune) afin d’établir un espace de transition, propice à l’entrée dans le dernier lieu.
Georges Tony Stoll demeure un inclassable
artiste. Ses paysages formels cachent des récits intimes, enfouis dans des
décors en devenir. La mobilité des corps se déverse sur nos rétines avides où
l’angoisse des lendemains qui déchantent s’impose parfois brutalement. L’artiste
évoque un paradoxal « territoire de l’abstraction » au travers de représentations
de paysages mentaux. Il se refuse à l’explication de texte (c’est-à-dire de ses
œuvres) nous obligeant à écrire de potentielles interprétations nées de subtils
rapprochements entre trivial et sublime. Il ne laisse aucun répit à
l’intelligence du regard qui doit se trouver constamment en éveil, jonglant
avec les époques, les corps et les références, le réel et le réel autre.
Christian Skimao
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