Exposition Mazaccio & Drowilal
Laisse à désirer
CACN, Place Roger Bastide, Nîmes
Du 11 mars au 4 juin 2022
Une non-duplicité
duplicative
« Mazaccio & Drowilal », dynamique
duo, se compose de deux artistes, Élise Mazac et Robert Drowilal, qui proposent
une approche très générationnelle face au déferlement d’images liées aux
représentations de la pop culture, des stars, sportifs, événements, animaux,
films, etc. provenant du web et d’ailleurs. Il s’agit pour eux de trouver une
réponse ne s’inscrivant pas dans une contestation frontale, mais d’opérer un
subtil (ou moins subtil) détournement. Si ce qui est représenté se trouve en
passe de devenir ce qui existe, la création d’un nouvel avatar qualifiable
d’artistique brouille la donne.
Sous le titre de « Laisse à désirer »,
se retrouve la double injonction du désir avec ce qu’il possède encore de
nouveauté, mais aussi la remarque scolaire malsonnante, liée au rendu d’un
devoir. Leur art se construit pourtant avec précision dans un monde de l’à-peu-près.
Travaillant souvent sur la notion du double et sa réappropriation, le CACN
expose une décennie de leurs créations, certaines mises en scène sur des fonds de
couleur un peu mièvre, reprenant le fameux leitmotiv « Before » et
« After » des marchands d’illusion du web, promettant de rajeunir ou
de perdre des kilos, comme par magie et par Photoshop interposé. En prenant par
exemple Cezanne Zero (2021), de la série Iconology, on trouve un
collage ou plutôt un « collimage » sur porte isoplane reprenant à la
fois une illustration d’un jeu vidéo, une reproduction de Cézanne, des traits
de peinture aérosol, des sangles, etc. La partie de présentation arrière, parée
de teintes diaphanes est une plaque d’acier avec les mentions
« Now/Then ». Il existe bien sûr une narration d’ensemble où nous
revenons à une trivialité significative de la lutte (des classes ?) entre
les fruits frais (bien que présents dans une nature morte) et une barquette de
frites provenant d’une chaîne de restauration rapide. Finalement, l’art de la
malbouffe nous entraîne vers l’art de Cézanne en une mise en abyme
vertigineuse.
![]() |
Mazaccio & Drowilal, Cezanne Zero, 2021 |
Une critique implicite du monde comme il va
se met en place, avec par exemple des portraits de chiens et de chats, un peu
trop vrais, aux yeux rougis, semblables à ceux des photos ratées prises par des
amateurs. Créateur et créatrice se mettent également en scène dans des clichés
glamour ou non, flirtant souvent avec le ridicule, semblables à modèles innocents
livré aux regards dévoyés des autres. La starisation de certains individus liés
à leur intense monétisation se trouve présente dans bien des domaines avec une
prédilection pour le football et le milieu artistique. Ainsi deux œuvres
encadrées, de la série Gold Sponsor (2018) reprenant à la fois le
fétichisme du supporter et celui du collectionneur, se déclinent respectivement
avec l’équipe TATE pour Drowilal soutenue par Sotheby’s et Deutsche Bank et
l’équipe LUMA Foundation avec WAGE et
Goldman Sachs pour Mazac. Où donc se situe la frontière entre réel et
fiction ? Dans l’affliction ou la friction ? En tout cas, chez eux,
l’esprit de finesse se cache « Avant » et « Après ».
Christian
Skimao
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