Exposition « Nicole Eisenman et les modernes. Têtes, baisers, batailles. »
Fondation Vincent van Gogh, Arles
Du 21 mai au 23 octobre 2022
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Nicole Eisenman, Le Kiss Deux, 2015 Encre sur papier, 128 × 114,3 cm. Collection privée. Courtesy : l’artiste |
Le « Grand Tour »
Semblable aux rockstars, Nicole Eisenman fait sa tournée européenne en quatre haltes muséales : Kunsthalle Bielefeld (Allemagne), Aargauer Kunsthaus (Suisse) ; Kunstmuseum Den Haag (Pays-Bas) ; et la Fondation van Gogh, dont nous parlerons ici. L’appellation générale Nicole’s European Travelling Survey Show reprend de façon parodique (vraiment ?), ce thème.
Son travail, figuratif, s’inscrit dans une recherche sur les
confrontations sociales et sexuelles, au travers d’une peinture qui se nourrit
ici de certaines grandes figures de la modernité et de l’avant-garde historique
des commencements, allant de la fin du 19e à la moitié du 20e
siècle. Cohabitent donc dans le même espace, des travaux d’Eisenman, d’Alice
Bailly, Max Beckmann, Otto Dix, Edward Munch, Pablo Picasso, Hermann Scherer, Felix
Vallotton, et beaucoup d’autres ainsi que deux Van Gogh. La scène du
« crime » se trouve donc délimitée à partir d’une trilogie intitulée Têtes,
baisers, batailles. Il semble intéressant d’opter pour une approche,
faussement policière, en voyant cette démarche comme une enquête de l’artiste sur
le monde comme il va et comme il devrait aller.
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Nicole Eisenman, Progress: Real and Imagined (Progrès, réel et imaginé), 2006 Huile et techniques mixtes sur toile (diptyque) 234,5 × 481 × 5 cm chaque Collection Ringier, Suisse |
Une œuvre sur papier comme Le Kiss Deux (2015) semble remplir les
trois fonctions précitées : deux têtes vues de très près, en train d'échanger
un baiser, dans une ambiance de lutte puisque l’une des deux présente un œil
exorbité durant l’échange. Où nous trouvons-nous véritablement ? Dans une
approche post-expressionniste, dans une lutte des sexes, dans une sidération
réciproque ou dans un malentendu pictural ? La fureur de la scène le
dispute à la distanciation voulue au travers de couleurs assez ternes, des
variations brunes plus ou moins réalistes qui esquissent les contours d’un
voyeurisme sous-jacent. Nicole Eisenman se met en scène dans un grand diptyque
nommé Progress : Real and Imagined (2006). D’un côté, elle apparaît
comme une Déesse en train de réaliser l’Histoire en marche (ne tient-elle pas
une plume d’oie à la main et ne se trouve-t-elle pas en train d’écrire ?) ;
de l’autre, se trouve une Arcadie féminine avec de nombreux aspects d’une vie
quotidienne idéalisée. D’un côté, l’Artiste est plus qu’imposante, de l’autre
fourmillent les détails plus ou moins minuscules qui reprennent certains codes
de la composition de Jérôme Bosch par exemple. Un excellent exemple des chocs
picturaux et de leur travestissement pour aboutir à d’autres codes narratifs.
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Nicole Eisenman, Beer Garden with Ash/AK (Biergarten avec Ash / AK), 2009 Fondation De Ying. Courtesy : l’artiste et Hauser & Wirth |
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Christian Skimao
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