jeudi 20 juillet 2023

Germaine Richier, musée Fabre, Montpellier, 2023

 Exposition Germaine Richier Une rétrospective

Musée Fabre, Montpellier

Du 12 juillet au 5 novembre 2023

 

 

Germaine Richier avec La Fourmi au Salon de Mai, 1955 Germaine Richier (b/w photo), Richier, Germaine (1904-59) / © Michel Sima / Bridgeman Images 

 

                               Volumes en devenir

 

 

  Germaine Richier demeure, faut-il le rappeler, une très grande sculptrice française. Son œuvre parle pour elle avec une force et une inventivité sans pareille. Sa disparition en 1959 nous a privé d’une vision toujours en devenir. Cette rétrospective attendue, réalisée conjointement avec le Centre Pompidou à Paris (du 1er mars au 12 juin 2003) présente une sélection de 200 œuvres allant des volumes aux dessins en passant par les gravures et les peintures.

 

  Le musée Fabre propose un parcours très didactique mais très nécessaire pour la situer dans son époque et montrer comment elle contourne les normes classiques en se lançant dans l’inconnu. Lors de ses débuts dans la statuaire, elle se réfère au modèle vivant, passant du Loretto (1934) à L’Ouragane (1948-49), sans oublier de nombreux bustes, qu’elle nomme ses « gammes ». Elle met en place un nouveau système référentiel dans le traitement du bronze, avec des trouées et des reliefs et une rugosité qui tend vers la défiguration. La prise en compte d’un tout organique renoue avec une sorte de « boue » primordiale d’où viendraient, métaphoriquement (?), ses statues. L’Ouragane semble en effet apparaître comme une déesse mère archaïque, version inversée des fades Vénus du 19ème siècle, portant en elle la puissance démiurgique des éléments, comme en témoigne la photographie de Brassaï de 1951-52.

 

  Le rapport à la nature s’accentue, provenant de ses souvenirs d’enfance dans la garrigue à Castelnau-le-Lez où elle a passé son enfance. De même les bas-reliefs du cloître Saint-Trophime à Arles jouent un rôle déterminant dans son envie de volume. Ses hybridations prennent corps avec La Chauve-souris (1946), Le Cheval à six têtes (1954-56) ou La Montagne (1955-56). L’influence du surréalisme se conjugue avec l’utilisation de matériaux non nobles provenant d’une activité de cueillette (bois flottés, coquillages) et de récupération (briques abandonnées, morceaux de céramique, outils de l’atelier) et d’un bronze naturel nettoyé. La brillance de l’ensemble fonctionne sur un jeu de tensions et de cassures uniques. Les contraires se rencontrent et s’assemblent pour aboutir à la création d’un genre fantastique.

 

  En 1946, avec la création de L’Araignée I apparaît la série dite des « sculptures à fil ». Un réseau complexe se met en place, reposant à la fois sur des calculs techniques, mais aussi sur la création d’un maillage qui crée de nouvelles correspondances. Cette approche matérielle et intellectuelle nous fait changer de dimension comme avec Le Griffu (1952). On comprend aujourd’hui ce que cette démarche avait de novateur, pouvant prendre place dans notre univers contemporain aux dimensions multiples.

 

  Affaiblie par la maladie, Germaine Richier, va néanmoins continuer son œuvre. Les Guerriers, sculptures de petit format, possèdent une force incroyable liée à leur stylisation et au côté acéré de certaines parties de leur corps. Ils sont l’essence de l’arme dans leur matérialité même. Enfin, viennent les dernières pièces d’un jeu d’échecs, L’Échiquier, grand (1959) en céramique et en couleurs avec le roi, la reine, le cavalier, le fou, la tour. Les pions n’existent pas.  L’inachèvement demeure une composante d’une réalisation poignante et superbe. À la fin, c’est la Dame qui gagne !

 

 

                                                                                                                           Christian Skimao

 

 

Germaine Richier, vue partielle de l'exposition, musée Fabre, 2023

  Dernière minute : un projet ambitieux porté par Montpellier Métropole et le musée Fabre, dans le cadre du réaménagement écologique de l’Esplanade Charles-de-Gaulle. Il s’agit de l’installation, à financement participatif, d’un nouveau tirage d’une grande sculpture de Germaine Richier, de plus de 3 mètres de haut, La Spirale (1957), inspirée de La Vrille, petite (1956), d’après un coquillage trouvé sur la plage.

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