vendredi 24 novembre 2023

Exposition Huma Bhabha, MO.CO, Montpellier, 2023.

 Exposition monographique de Huma Bhabha

« Une mouche est apparue, et disparut »

MO.CO. Montpellier

Du 18 novembre 2023 au 28 janvier 2024

 

 

Huma Bhabha, VESSEL, statue matériaux divers, 2014.


                        Comme une boule à facettes

 

  L’excellent travail de cette artiste d’origine pakistanaise balaie tous les registres, allant de la contemporanéité à la relecture des grands artistes de la modernité et des temps anciens, en passant par des références aux formes populaires du cinéma et de la science-fiction. Il en va de même avec les matériaux utilisés, glissant avec aisance de l’argile au bronze en ne négligeant point le polystyrène, pour ne citer qu’eux. Huma Bhabha, qui réside Etats-Unis, opte pour une approche résolument actuelle, se voulant non dépendante des étroites références nationales, ouvrant des portes pour toutes et tous sur les mondes passés et futurs.

 

  Si Centaur (2000) ouvre l’exposition, il s’agit de montrer où réside cette interpénétration, évoquant des mythes anciens avec des matériaux d’aujourd’hui. La naissance des possibles surgit de l’incongruité entre le trivial et le grandiose au travers de la force de l’assemblage. Parfois, une tête monumentale frappe par son découpage en lamelles augmentant les points de vue, comme celle intitulée Call at Will2009qui se compose de couches verticales de bois et de polystyrène mêlées à de l’argile, du fil de fer et de l’acrylique. La puissance du résultat semble presque contredire la trivialité des matériaux. Sa pensée œuvre au recyclage des matériaux en une vertigineuse approche. Si nous nous trouvons bien dans le monde actuel, Huma Bhabha convoque avec force les temps antiques en une rencontre improbable.

 

  Un vers d’Omar Khayyâm, le grand poète persan des 11ème et 12ème siècles, sert de fil conducteur et donne le titre à l’exposition. Cette mouche qui apparaît et disparaît constitue une énigme poétique de taille. Mais revenons aux statues qui mises ensemble créent un effet de sidération. L’individualité de chacune se trouve transformée par cette nouvelle mise en scène qui semble jouer avec des codes archaïques. Ces références totémiques mêlent apparences humaines et animales dans un tourbillon plastique. Qui donc connaît précisément la signification exacte des anciennes divinités de pierre et celle des neuves idoles composites voulues par la créatrice ? The Hood Maker (2019), statue composée de liège, de synthétique et de peinture acrylique offre une représentation animale d’un côté et humaine de l’autre, symbole d’une incroyable hybridation.

 

Huma Bhabha, Sans titre, oeuvre sur papier, 2021-22 

  Des œuvres sur papier déclinent des portraits de potentiels aliens, parfois cruels, parfois égarés, mais toujours traités de façon expressionniste. Là encore la rencontre fortuite entre un style et une idée crée cet indicible décalage. Notre contemporanéité se trouve prise au piège des effigies de terre et de bronze tandis que plane au-dessus de nous le spectre d’amours (extra) terrestres toujours recommencées.

                                                                                                                           Christian Skimao

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