Exposition
Mitja Tusek ici, ailleurs
Ceysson
& Bénétière au Domaine de Panery ( près d’Uzès)
Du 19
janvier au 20 février 2024
Mitja Tusek, Fact checking, 2016
Pièges
Il est des rencontres
fortuites qui ouvrent le regard sur un ailleurs caché. Ainsi Michel Duport,
artiste bien connu, qui passait voir les « forêts » de Mitja Tusek a
évoqué devant moi cette notion de piège. En effet, les toiles de l’artiste d’envergure
internationale, d’origine slovène et de nationalité suisse proposent un résultat
visuel où ses écrasés de peinture constituent une idée de forêt ou plus
précisément encore un piège abstrait ou s’égare une idée figurative. Que
voyons-nous véritablement ? Et que fantasmons-nous inconsciemment ?
Mitja Tusek travaille de façon sérielle avec
un monde de couleurs où les repères s’effacent et où le regard finit par se
perdre, car il n’y a ni horizon, ni ligne de fuite. L’extrême matérialité de sa
production se trouve confortée par l’utilisation de découpes de papier bulle
(film bulle, plus exactement), les mêmes qui servent à l’emballage des œuvres
d’art, imprégnées de peinture puis pressées plus ou moins fortement sur la
toile. Cet étrange mouvement crée des empreintes que l’on retrouve dans le
résultat final de l’œuvre, introduisant dès lors une sorte de blocage par
rapport à une appréciation trop naturaliste. Ces variantes vertes, bleues et
brunes créent en apparence un espace illusionniste pour celui ou celle qui
regarde. Mais il ne s’agit pas ici du but voulu par l’artiste qui s’inscrit
dans une peinture beaucoup plus conceptuelle.
Certaines œuvres n’utilisent pas ce processus
lié au papier bulle, comme The wind blow high et The wind blow low
(2019) qui composent un diptyque s’inscrivant dans l’histoire de l’art. Peut-on
évoquer les peintures de l’Ecole de Barbizon, mais passées à la moulinette
d’une réflexion intellectuelle sur l’apparence des choses ? Ou encore les
paysages de Courbet où le vert apparaît parfois dans son artificialité même ? Les
titres nous éloignent d’ailleurs de toute référence naturelle ou élégiaque et
laissent planer un grand doute. Une narration se met en place, en fonction des
questionnements picturaux et philosophiques de l’artiste, mais où le sens
change en fonction de l’appréciation de chacune et de chacun. Si les archétypes
ont la vie dure, l’art se cache souvent dans les détails.
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Christian Skimao
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