Deux
expositions
Dominique
De Beir, Accroc & Caractère
Pierre
Buraglio …d’après…autour…avec…selon
Musée
Fabre, Montpellier
Du 7
décembre 2024 au 5 mars 2025
Murmurer
à l’oreille des collections
Dominique De Beir, Zone verte, 2014. Musée Fabre, 2024.
Deux artistes de talent qui entretiennent
aussi une relation de professeur à élève circulent avec brio dans les
collections du musée Fabre. Commençons
avec Dominique De Beir, née en 1964, qui se situe, avec malice, dans le rôle de
l’ancienne élève de Buraglio. Elle poursuit depuis des années un travail
questionnant et singulier autour des supports, intervenant sur toutes sortes de
papiers jusqu’à des matériaux plus éloignés. Ainsi Zone verte (2014),
appellation ironique pour un matériau aussi synthétique, se compose de
polystyrène, de peinture et d’impacts réalisés avec des outils créés par ses
soins. Elle aussi se réfère à de nombreux artistes comme Eve Gramatzki ou
Pierrette Bloch dont elle a été l’assistante. Pourtant, ses filiations la
conduisent paradoxalement à une forte singularité. Sa façon d’utiliser des
outils pour trouer, percer, creuser la « peau », dont certains se
trouvent exposés, crée un délicieux frisson de transgression. Avec la
dénomination « Accroc » et « Caractère », les deux termes
doivent se séparer avant de s’assembler à nouveau, car le premier relève de
l’accidentel et le second de l’univers typographique. La très grande pièce, au
titre éponyme, suspendue dans l’atrium du musée, reprend les codes des
perforations des papiers ainsi que l’utilisation de la paraffine. Son écriture
exploratoire et contemporaine repose également sur sa connaissance du braille
qui permet de comprendre les choses autrement, lire par le toucher. Comme le
dit si bien l’artiste « Trouer signifie avant tout regarder autrement… »,
un acte essentiel où les lignes du papier rejoignent les lignes de vie.
Pierre Buraglio (gauche), 2024 d'après Max Leenhardt (droite), 1899, D'après ...Etude pour Le prêche au désert. Musée Fabre, 2024.
Continuons avec Pierre Buraglio, né en 1939,
en pleine forme, qui joue le rôle du maître de la précédente, et dont le sous-titre
de son exposition « La peinture s’édifie sur ses propres ruines », ne
manque ni de poésie, ni de piquant, ni non plus de vérité. Proche du mouvement
Supports-Surfaces, sans y appartenir, il va interroger la peinture et les
problématiques des supports avec ses « Agrafages », la notion de
cadre avec sa série des « Fenêtres ». Parcourant depuis sa jeunesse
les musées, il va peu à peu reproduire certaines
parties des oeuvres au travers de dessins plus ou moins épurés. Il a consacré de nombreuses
visites aux salles du musée Fabre, réinterprétant certaines de ses œuvres les
plus connues. On retrouve donc les originaux (Bazille, Courbet, David,
Leenhardt, etc.) et les représentations distanciées réalisées par Buraglio. Ainsi
en va-t-il pour Étude pour Le prêche au désert de Maximilien Leenhardt (1899)
qui devient Aux huguenotes (2024) de Pierre Buraglio ou encore Académie dite
Hector (1778) de Jacques-Louis David transmuté en une série de dessins de
Buraglio D’après David-Hector (2023). Des pièces plus anciennes
parsèment l’ensemble, comme Metro della Robbia, composée de morceaux de
tôles émaillées bleues du métro parisien, référence directe aux grès vernissés
de la famille de céramistes Della Robbia de Florence. Ce « mélange » intergénérationnel
débouche sur une lecture nouvelle, passionnante et parfois émouvante.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire