Exposition « Circumnavigation
jusqu’à épuisement »
Clarissa Tossin
La Kunsthalle (Centre d’art
contemporain) de Mulhouse
Du 1er juillet au 31
octobre 2021
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Vue globale mais partielle de l'exposition de Clarissa Tossin avec Death by Heat Wawe au sol |
Comme
une « AMAZON »
Les temps écologiques génèrent des actions
artistiques. Ou bien les actions artistiques préparent les temps écologiques.
Clarissa Tossin, artiste brésilienne vivant à Los Angeles nous propose un
parcours esthétique à partir d’une catastrophe en cours. Une série d’œuvres
complémentaires constitue sa réflexion autour de l’Amazonie et de sa
déclinaison sémantique et formelle avec le géant du commerce Amazon. Légèrement
anxiogène mais très parlante, une œuvre se trouve entièrement réalisée avec des
cartons d’expédition Amazon découpés appelée Disorientation Towards Collapse
[Heavy]. Le travail lent et minutieux qui aboutit à un tressage offre donc
un contraste avec la volonté du géant de l’e-commerce d’aller toujours plus
vite. Une autre série d’œuvres utilise également des tissages réalisés avec des
morceaux de boîtes d’expéditions d’Amazon jointes à des images de la Terre, de
la Lune et de Mars prises par un satellite de la NASA, offrant une réalité
nouvelle au regardeur. La possibilité de se placer d’un point de vue autre
change la nature de l’objet de base (Circumnavigation Towards
Exhaustion : Power Grid). Sa transformation conduit dès lors à un
questionnement global sur la nature éphémère des choses. Avec New Planet,
l’artiste réalise à la fois une création traditionnelle née d’un savoir-faire
ancestral et paradoxalement porteur d’une interrogation contemporaine sur les
dommages liés à l’exploitation sur Terre et dans le futur sur Mars.
Une pièce maîtresse prend place au centre de
la salle principale, nommée Death by Heat Wave (Acer pseudoplatanus,
Mulhouse Forest), réalisée avec un érable sycomore mort, coupé dans une
forêt près de Mulhouse, recouvert d’un moulage en silicone. Elle s’étend avec
force dans une horizontalité où se mêlent sentiment du désastre et puissance
plastique. Il faut tourner autour avec lenteur et s’imprégner de l’étrange peau
supplémentaire qui recouvre l’arbre mort (linceul ou gangue plastique ?)
Enfin, exposée sur un des murs, une série de masques mortuaires moulés sur le
propre visage de la créatrice, Becoming Mineral, s’inscrit dans le futur
de la disparition et dans la réapparition au travers de l’argile. La terre
devient œuvre d’art, celle-ci redevenant terre à la fin de son cycle. Une
pensée bouddhique sous-tend peut-être ces masques étonnants qui possèdent
également une aura questionnante.
Clarissa Tossin joue sur de nombreux registres, s’évertuant à rendre accessibles à toutes et à tous son message. Les interconnexions didactiques fonctionnent parfaitement soutenues par une étonnante puissance formelle. Le désastre écologique annoncé se trouvera-t-il évité ou non ? Tout demeure encore possible sinon nous pourrons aussi envisager de « finir en beauté".
Christian Skimao
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