Exposition « notre musée. Une collection sentimentale. Œuvres de la Collection Lambert & autres objets qui font battre le cœur. »
Collection Lambert (musée d’art
contemporain), Avignon.
Du 24 septembre 2022 au 29 janvier 2023.
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| Thomas Hirschhorn Sas de contamination (détail), Coll. Lambert, 2022. |
Déchaîne ton récit !
D’emblée, l’expérimentation le dispute à la solidarité. Cette exposition, peu banale, qui dans son intitulé même, place le « nous » en tête, exprime le partage au travers d’une action la plus participative possible. Le musée, lieu des conservations, ouvre et s’ouvre aux autres, au travers d’œuvres glanées auprès d’acteurs non professionnels du monde l’art qui se trouvent parfois en situation d’exclusion, d’artistes invités et de Stéphane Ibars en qualité de coordonnateur du projet. Cette monstration s’inscrit dans la programmation du festival C'est pas du luxe et comprend des partenariats avec la Fondation Abbé Pierre et Emmaüs France, pour ne citer que ceux-ci, ainsi que des prêts du Mucem à Marseille et de l’Hôtel Agar à Cavaillon. Les quinze intervenantes et intervenants du groupe curatorial se trouvent à la fois décideurs, prescripteurs et prêteurs d’objets à forte valeur sentimentale et artistique. La frontière des divers rôles muséaux devient ainsi très floue et de nombreuses barrières tombent, supplantées par la force des récits d’accompagnement.
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| Sabots (Untitled) de Jean-Michel Basquiat (gauche) et Galoches familiales de Bernie Marie (droite), Coll. Lambert, 2022. |
Une circulation sinueuse entre les étages
commence par le Sas de contamination (2000) de Thomas Hirschhorn,
installation en forme de couloir au plafond grillagé, composée d’œuvres peintes
et d’objets divers, bardés de chaînes, brouille les repères entre art et réalité.
22 ans après sa première présentation pour l’ouverture de la Collection, elle
se trouve réactivée et restaurée, pour remplir à nouveau son rôle symbolique et
tangible de passage. Ensuite, des galoches familiales sélectionnées par Bernie
Marie cohabitent dans une vitrine avec des sabots en bois pyrogravés par
Jean-Michel Basquiat (1988) en un questionnement saisissant. Une valise familiale
de 1987, d’origine italienne, de Pascal Fra cohabite avec une grande peinture
de Miquel Barceló intitulée Ahab (1984), les deux symbolisant le
déplacement et la migration. Un boubou à rituels de Côte d’Ivoire apporté par
Marie-Laure Geuffroy se tient en regard avec Les Reines de France (2001)
d’Anselm Kiefer, dialogue entre les continents et les mémoires. Des bagues « calaveras »,
d’origine mexicaine, avec des motifs de têtes de mort, appartenant à Fabrice Casimir, cohabitent avec une
photographie de Nan Goldin, Fatima Candles, Portugal (1998), en un
rituel immémorial. De même une radio faisant également office de lecteur de cassettes
de 1989, de Tanger, permet d’écouter Oum Kalthoum. Un filet de voix de la
grande chanteuse semble provenir de l’au-delà en raison de l’usure de
l’appareil. C’était la chanson préférée de la mère de Mohamed El Khatib, le
seul souvenir qui lui en reste. En parallèle, dans l’autre pièce, se trouve une
aérienne installation nommée Oasis (2008) de Zilvinas Kempinas. Au
travers de ces quelques exemples de mise en scène, l’évanescence, la mémoire,
l’émotion et la dignité se trouvent donc au rendez-vous. Le public, devenu plus
que spectateur, y apportera une touche nouvelle, toujours renouvelée par un fort
sentiment d’appartenance au genre humain.
Christian
Skimao


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