jeudi 23 mars 2023

Exposition Samuel Rousseau "Et pourtant elle tourne !", Grenier à sel, Avignon, 2023

 Exposition « Et pourtant elle tourne ! »

Samuel Rousseau

Le Grenier à sel, 2 rue du Rempart Saint-Lazare, Avignon.

Du 17 mars au 17 juin 2023

 

 

Brave Old New World, Samuel Rousseau, 2011.

 

             Un magicien dans l’espace-temps

 

  Samuel Rousseau est un artiste foisonnant qui travaille tous azimuts. Une quarantaine d’œuvres faisant appel aux nouvelles technologies et à sa vision du monde se répartissent dans un parcours en deux parties intitulées : Le chaos et Du côté des étoiles. Depuis quelques années déjà, l’artiste explore différents mondes, alliant musiques actuelles et réflexions sur l’écologie, le féminisme et une certaine désespérance cultivée ; s’il aime se mettre en scène, il opte également pour des projets qui permettent au public d’expérimenter ses créations. 

  New York joue un rôle important dans sa première partie, Le chaos. Ainsi Brave Old New World  (2011) présente la Grosse pomme en surchauffe, se nourrissant de ses habitants comme d’un combustible inépuisable. Le caractère d’étrangeté de cette représentation murale tient au fait qu’il s’agit d’une vidéo-projection sonore sur un bas-relief en bois. De même pour Trafik, (2023) une installation de palettes de bois et d’écrans digitaux, véritable peau électronique. Les images concernent des habitants qui se pressent à diverses heures au pied du métro Ground Zero ainsi que les façades de la cité. Œuvre évolutive, elle pourrait augmenter de façon exponentielle, les palettes en bois se multipliant en fonction des différents lieux, créant dès lors de nouveaux labyrinthes. Faisant moins allusion à la ville de tous les possibles, mais déclinant l’industriel désastre et la pollution, il recycle des flacons qui laissent jaillir des fumées virtuelles avec Paysage domestique (2013) ; il introduit également une réflexion sur la liberté de circulation et des moyens de répression au travers de Soleil noir (2017) montrant de fragiles créatures s’échappant des barbelés et se trouvant alors prises au piège des projecteurs.

Soupe cosmique, Samuel Rousseau, 2020.


  N'oublions pas de rêver, tant que nous le pouvons encore, à un avenir moins toxique, semble le credo de la seconde partie de l’exposition, Du côté des étoiles. Ainsi en va-t-il pour une œuvre participative nommée Sous les jupes de la Voie lactée (2023) où spectateurs et spectatrices peuvent se coucher sous un vaste jupon d’organza tandis que défilent planètes et nébuleuses. Cette dimension cosmique, assez inattendue, se retrouve dans une réalisation plus modeste mais très parlante, Soupe cosmique (2020) où le réel d’une assiette à soupe et sa cuillère laissent voir le « grand bain » aux origines de l’univers. La trivialité le dispute au mystique dans une interrogation scientifique sur les fameux trous noirs. Plus familier, L’arbre et son ombre (2008), convoque la magie de la nature et son éternel retour. L’installation associe le tronc d’un châtaignier et d’une vidéo qui fait revivre à l’arbre décharné le cycle des saisons. La vie revient, à la fois numérique et poétique, dans une incessante succession de presque vérité. Au sous-sol, Le cerveau (2020), irradie dans la pénombre, mimant les connexions neuronales en un ballet multicolore, dernier recours d’une prise de conscience avant la chute finale.

  Comme un coup de poing visuel, rappelons que la monstration, non voulue comme une rétrospective par Rousseau, démarre dans le hall d’entrée, avec Révolution virale (2020), une sculpture accrochée dans les airs, multitude de poings tendus féminins, rappel des poings masculins révolutionnaires, mais qui annonce leur dépassement dans le cadre d’un féminisme décomplexé. Du passé faisons, non point table rase, mais tremplin pour un renouveau partagé.           

                                                 Christian Skimao

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