lundi 24 avril 2023

Exposition Amalia Laurent, CACN (Centre d’Art Contemporain de Nîmes), 2023

 Exposition Amalia Laurent

L’édifice immense du souvenir

CACN (Centre d’Art Contemporain de Nîmes)

Du 21 avril au 29 juillet 2023

 

 

Amalia Laurent. Installation "Tous n'attendent ..." Vue partielle. CACN, 2023.

                     Transculturelles transparences

 

 

  Amalia Laurent est une artiste d’aujourd’hui, avec des origines franco-indonésiennes, lui permettant de réinterpréter des techniques anciennes comme le batik (séries Balcon, balcons), en se référant conjointement à un certain temps, perdu ou retrouvé (Proust), tout en jonglant avec les codes contemporains et l’utilisation de techniques très variées. La musique joue également un très grand rôle, que ce soit au travers des sons du gamelan, instrument traditionnel javanais, mais aussi de réalisations sonores croisées, dont certaines réalisées spécialement à l’occasion de sa venue au CACN (Je me suis étirée sans quitter ma place).

  Transparences et interférences semblent des notions utiles à connaître pour cerner son travail, où l’apparence des choses se transforme au fur et à mesure de l’avancée du spectateur et de la spectatrice. Avec une grande réalisation nommée Tous n’attendent que d’être vivant (2018) on parcourt toute la gamme des dits et des non dits, de la cartographie militaire et maritime de la Deuxième Guerre Mondiale, revisitée, ainsi que des structures en rotin qui définissent profondeurs et courants marins dans la tradition indonésienne. Les objets posés au sol, vestiges d’une performance, conservent leur part de mystère car situés de l’autre côté d’un de ses voiles colorés. La notion de magie vient dès lors s’insérer dans une représentation d’un monde mouvant, où la réalité le dispute aux apparences. Un livre-partition sert à donner le rythme à la musique d’accompagnement tandis que des vêtements cérémoniels, suspendus, attendent de reprendre vie.

  Transparences et confluences apparaissent comme d’autres notions indispensables. L’utilisation de la tarlatane nous convie à une convocation lointaine de Supports-Surfaces avec Daniel Dezeuze et Noël Dolla tandis que les toiles convoquent Claude Viallat. Ainsi naissent des chocs étonnants à près de 50 ans de distance. Des références à la ville de Faugères, dans l’Hérault, celle du vignoble, achèvent de brouiller les cartes. Notre vue, chavirée, fait dès lors se rencontrer des reproductions d’images de grand format d’une église qui changent de nature, avec leur exposition dans une salle plus petite à Nîmes (Pour alléger le fardeau des murs, 2022). La notion de plissement et son glissement tant matériel que conceptuel ouvre de nouvelles perspectives dans ses mises en abyme.


Amalia Laurent. Installation "Tous n'attendent ..." Vue partielle. CACN, 2023.

  A l’extérieur, déployée, une œuvre de très grand format sert de signalétique. Une citation d’un écrivain-aviateur du siècle précédent, « L’essentiel est invisible pour les yeux », semble accompagner cette exposition de grande qualité. La technologie renvoie à des mondes oubliés, tandis que la tradition ouvre sur de nouvelles fictions. Si la musique nous soutient à chaque pas, découvrons avec fascination comment Amalia Laurent met en scène l’imperceptible.


 

                                                                                                                                                  Christian Skimao

Aucun commentaire: