samedi 29 juin 2024

Exposition collective "Être Méditerranée", MO.CO. Panacée, Montpellier,2024


 

Exposition collective Être Méditerranée

Avec Nelly Agassi, Diana Al-Hadid, Andreas Angelidakis, Chiara Camoni, Ali Cherri, Aysha E Arar, Simone Fattal, Mounir Gouri, Nour Jaouda, Melike Kara, Elias Kurdy, Teresa Lanceta, Sanaa Mejjadi, Mladen Miljanović, Sara Ouhaddou, Adrian Paci, Zoë Paul, Aïcha Snoussi, Tarwuk, Elif Uras, Adrien Vescovi, Marina Xenofontos

MO.CO. Panacée, Montpellier

Du 22 juin au 22 septembre 2024

 

 

Chiara Camoni, un des quatre coliers de la série "Grande Sorella", MO.CO. Panacée, 2024

 

                        Notre, votre, leur Méditerranée

 

 

  Une exposition des bordures, très éclectique, sous la houlette de Rahmouna Boutayeb se déploie dans les locaux de la Panacée. 22 artistes issu(e)s de la zone méditerranéenne explorent l’histoire, les mémoires, les savoir-faire, le réel et les fantasmes. Que signifie aujourd’hui l’expression Mare Nostrum issue de l’empire romain ? Moins qu’autrefois, d’un point de vue géopolitique, mais tout peu basculer du jour au lendemain, beaucoup d’un point de vue émotionnel, énormément du côté  des déplacements des populations fragilisées par les dictatures et la misère ? Du côté de l’art et de la culture, l’Europe, l’Afrique et le Proche-Orient se mélangent autour de cette Méditerranée pour offrir une certaine vision du monde.

 

  Les artistes explorent les interstices d’une réalité personnelle se doublant d’une pensée plastique. Ainsi Chiara Camoni et ses quatre colliers monumentaux, « Grande Sorella » composés de schiste, de porcelaine, de grès émaillé, de fleurs et de sable. Associés à une potentielle géante, « Grande Sœur », cette œuvre interpelle l’imaginaire mais convoque également l’intelligence des femmes et leur sens de la collaboration. Aïcha Snoussi, d’origine tunisienne, nous étonne comme d’habitude. Artiste de grand talent qui bouscule les codes, elle présente ici une série intitulée « Layla Min Omri » (« Une nuit dans ma vie ») Elle s’inspire de l’affiche du film Un jour de ma vie (1961), fusionne les traits de l’acteur et chanteur égyptien Abdel Halim Hafez avec ceux de Leïla, la grand-mère de l’artiste, ainsi que leurs deux voix. Dans une pénombre propice, où scintille une lumière verte, soutenue par une discrète mélopée, se fondent souvenirs privés et collectifs, présents et passés.

 

Ali Cherri,"Standing Figure (Pow!)", MO.CO. Panacée, 2024. 

  Les sculptures d’Ali Cherri convoquent des références mythologiques mais également liées à sa propre enfance libanaise. Une idée de drame questionne ce mélange des genres, entre formes humaines et animales. La reprise de concepts antiques se décline avec un questionnement sur la fragilité des volumes (sable, argile, pigments) et la brutalité des masques en fonte. Une statuaire questionnante, qui parfois s’abandonne au vertige des songes comme dans « The Dreamer » (« Le rêveur »).

 

  Les environnements de peintures et de décorations  de Meline Kara, d’origine kurde, possèdent une grande force et en même temps une grande douceur. Cette façon d’envelopper le regard, tout en focalisant sur des références picturales abstraites de la modernité créent un effet saisissant. Sa mémoire puise à la fois dans sa connaissance d’un monde familial et dans l’international d’un art en mouvement. Dans une proximité de mise en scène, Adrien Vescovi qui vit et travaille à Marseille, propose de grandes toiles imprégnées de décoctions de plantes et de minéraux. Elles se trouvent cousues ensemble par la suite dans le cadre d’un travail participatif. L’ensemble, à la fois imposant et intime, laisse ouvert un nouvel espace du rêve.

 

    Dans le cadre des histoires et de l’Histoire, le travail  de Miladen Miljanovic, venant de Bosnie-Herzégovine, surprend énormément. Dans son œuvre « Blaupunkt 20/21 » (marque allemande de matériel électronique et audiovisuel), il grave sur des blocs de granit des personnages célèbres et inconnus, des bâtiments disparus ou en train de disparaître, en un foisonnement intense. Ce patient travail de gravure opère en référence aux écrans de télévision mais dans une fixité visuelle et dans la masse même du temps. Une approche paradoxale à l’heure actuelle où tout s’évapore alors que lui tente de retenir les choses. Elias Kurdy, né à Damas et travaillant aussi à Marseille, présente l’œuvre la plus en phase avec le thème de la monstration « Untitled (Ostium maris nostri » (« Sans titre (la porte de notre mer) »). Cette porte monumentale, franchissable physiquement, se trouve décorée de bas-reliefs antiques, de trésors archéologiques, bref de tout le décorum antique reconnu par les musées; néanmoins toutes ces pièces sont fausses et creuses, les matériaux nobles comme le bronze ne se trouvent pas au rendez-vous et l’ensemble opte pour un décor de théâtre. Une sorte de regard ironique et en « creux » sur les trésors incontournables d’autrefois.


  « E la nave va… »

                                                                                                                                 Christian Skimao

 

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