Exposition
collective Être Méditerranée
Avec Nelly
Agassi, Diana Al-Hadid, Andreas Angelidakis, Chiara Camoni, Ali Cherri, Aysha E
Arar, Simone Fattal, Mounir Gouri, Nour Jaouda, Melike Kara, Elias Kurdy, Teresa
Lanceta, Sanaa Mejjadi, Mladen Miljanović, Sara Ouhaddou, Adrian Paci, Zoë Paul,
Aïcha Snoussi, Tarwuk, Elif Uras, Adrien Vescovi, Marina Xenofontos
MO.CO.
Panacée, Montpellier
Du 22
juin au 22 septembre 2024
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| Chiara Camoni, un des quatre coliers de la série "Grande Sorella", MO.CO. Panacée, 2024 |
Notre,
votre, leur Méditerranée
Une exposition des
bordures, très éclectique, sous la houlette de Rahmouna Boutayeb se déploie
dans les locaux de la Panacée. 22 artistes issu(e)s de la zone méditerranéenne explorent
l’histoire, les mémoires, les savoir-faire, le réel et les fantasmes. Que
signifie aujourd’hui l’expression Mare Nostrum issue de l’empire
romain ? Moins qu’autrefois, d’un point de vue géopolitique, mais tout peu
basculer du jour au lendemain, beaucoup d’un point de vue émotionnel,
énormément du côté des déplacements des populations fragilisées par les
dictatures et la misère ? Du côté de l’art et de la culture, l’Europe,
l’Afrique et le Proche-Orient se mélangent autour de cette Méditerranée pour
offrir une certaine vision du monde.
Les artistes explorent les interstices d’une
réalité personnelle se doublant d’une pensée plastique. Ainsi Chiara Camoni et
ses quatre colliers monumentaux, « Grande Sorella » composés de
schiste, de porcelaine, de grès émaillé, de fleurs et de sable. Associés à une potentielle
géante, « Grande Sœur », cette œuvre interpelle l’imaginaire mais convoque
également l’intelligence des femmes et leur sens de la collaboration. Aïcha
Snoussi, d’origine tunisienne, nous étonne comme d’habitude. Artiste de grand
talent qui bouscule les codes, elle présente ici une série intitulée
« Layla Min Omri » (« Une nuit dans ma vie ») Elle
s’inspire de l’affiche du film Un jour de ma vie (1961), fusionne les
traits de l’acteur et chanteur égyptien Abdel Halim Hafez avec ceux de Leïla,
la grand-mère de l’artiste, ainsi que leurs deux voix. Dans une pénombre
propice, où scintille une lumière verte, soutenue par une discrète mélopée, se
fondent souvenirs privés et collectifs, présents et passés.
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| Ali Cherri,"Standing Figure (Pow!)", MO.CO. Panacée, 2024. |
Les sculptures d’Ali Cherri convoquent des
références mythologiques mais également liées à sa propre enfance libanaise.
Une idée de drame questionne ce mélange des genres, entre formes humaines et
animales. La reprise de concepts antiques se décline avec un questionnement sur
la fragilité des volumes (sable, argile, pigments) et la brutalité des masques
en fonte. Une statuaire questionnante, qui parfois s’abandonne au vertige des
songes comme dans « The Dreamer » (« Le rêveur »).
Les environnements de peintures et de
décorations de Meline Kara, d’origine
kurde, possèdent une grande force et en même temps une grande douceur. Cette
façon d’envelopper le regard, tout en focalisant sur des références picturales
abstraites de la modernité créent un effet saisissant. Sa mémoire puise à la
fois dans sa connaissance d’un monde familial et dans l’international d’un art
en mouvement. Dans une proximité de mise en scène, Adrien Vescovi qui vit et
travaille à Marseille, propose de grandes toiles imprégnées de décoctions de
plantes et de minéraux. Elles se trouvent cousues ensemble par la suite dans le
cadre d’un travail participatif. L’ensemble, à la fois imposant et intime,
laisse ouvert un nouvel espace du rêve.
Dans
le cadre des histoires et de l’Histoire, le travail de Miladen Miljanovic, venant de Bosnie-Herzégovine,
surprend énormément. Dans son œuvre « Blaupunkt 20/21 » (marque
allemande de matériel électronique et audiovisuel), il grave sur des blocs de
granit des personnages célèbres et inconnus, des bâtiments disparus ou en train
de disparaître, en un foisonnement intense. Ce patient travail de gravure opère
en référence aux écrans de télévision mais dans une fixité visuelle et dans la
masse même du temps. Une approche paradoxale à l’heure actuelle où tout s’évapore
alors que lui tente de retenir les choses. Elias Kurdy, né à Damas et
travaillant aussi à Marseille, présente l’œuvre la plus en phase avec le thème
de la monstration « Untitled (Ostium maris nostri » (« Sans
titre (la porte de notre mer) »). Cette porte monumentale, franchissable
physiquement, se trouve décorée de bas-reliefs antiques, de trésors archéologiques,
bref de tout le décorum antique reconnu par les musées; néanmoins toutes
ces pièces sont fausses et creuses, les matériaux nobles comme le bronze ne se
trouvent pas au rendez-vous et l’ensemble opte pour un décor de théâtre. Une
sorte de regard ironique et en « creux » sur les trésors
incontournables d’autrefois.
« E la nave va… »
Christian Skimao


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