mercredi 3 juillet 2024

Expositions Jean Hugo, Montpellier et Sète, 2024.

 

Double exposition Jean Hugo

« Le regard magique », musée Fabre, Montpellier

Du 28 juin au 13 octobre 2024

« Entre ciel et terre », musée Paul Valéry,

Du 29 juin au 13 octobre 2024

 

 

Jean Hugo, "Les Centaures", 1929, exposition Musée Fabre, Montpellier, 2024.

 

                      Les diverses voies créatrices de Jean Hugo

 

 

  A Montpellier se tient le premier volet de cette grande exposition Jean Hugo. D’emblée, signalons l’énorme travail de contextualisation des œuvres opéré par Michel Hilaire et Florence Hudowicz. Depuis la naissance de Jean Hugo dans une grande famille ouverte aux arts jusqu’aux années folles (les années 20 du 20ème siècle) avec Apollinaire et Cocteau, et l’ouverture au Surréalisme par le biais de sa femme, Valentine Gross, devenue Hugo, se met en place une approche conceptuelle et esthétique sans laquelle l’artiste éclectique ne serait pas devenu le peintre inspiré. La Grande Guerre a beaucoup marqué Hugo, comme tous les jeunes gens de sa génération avec les fins d’un rêve européen de paix et de prospérité (certes teinté d’un violent impérialisme à l’égard du reste du monde) et d’une boucherie annonciatrice d’un deuxième round. La série des trois paravents exposés La Mythologie (entre 1925 et 1928) pourrait traduire cette transition avant d’arriver à cette toile étonnante et syncrétique, mélange entre paysans locaux et divinités antiques, Les Centaures (1929). L’essentiel ici est de découvrir les influences diverses qui sous-tendent sa production, au début très ouverte avec les décors de théâtre, costumes de scène, etc. jusqu’à sa recherche dans l’espace privilégié du tableau, après 1929. La crise économique mondiale semble rejoindre la crise existentielle de Jean Hugo et le conduit à adopter un catholicisme salvateur, voir L’imposteur (1931). La poésie d’Ovide trouve sa place dans une réinterprétation plastique des Métamorphoses (1929). L’influence de maîtres se fait jour avec des artistes anciens comme Pierro della Francesca et Nicolas Poussin ou des contemporains comme Roger de La Fresnaye, Pablo Picasso, Le Douanier Rousseau, Fernand Léger, Léopold Survage ou Giorgio de Chirico. Jean Hugo, autodidacte, s’en empare, les digère et les réintègre dans sa propre création.

 

   À Sète, deuxième étape du voyage hugolien, saluons l’approche originale de Stéphane Tarroux et d’Ingrid Junillon qui proposent des œuvres plus tardives de l’artiste. On retrouve des paysages, baignés de cette lumière âpre et languedocienne qui aurait des similitudes avec celle de la Grèce, une sorte de plongée mythologique basée sur une ruralité aujourd’hui presque insaisissable ; la stylisation générale des lieux et des personnages offre un caractère, en apparence naïf, mais qui dissimule une intemporalité certaine avec aussi une inquiétude sous-jacente, comme La Défonceuse (1956). La notion de voyage y trouve également sa place avec des tableaux anglais comme Chesilton en Angleterre (1959) ; notons l’importance de l’Angleterre pour Jean Hugo qui va épouser Lauretta Hope-Nicholson, citoyenne britannique, en 1949, et avec qui il aura sept enfants. Pour l’Exposition universelle de Montréal en 1967, Jean Hugo va travailler sur divers pays dont la Tunisie est le seul qu’il connaît. Une façon de porter un regard universel en gardant une forte nostalgie d’un monde passé puisque le programme s’intitule Paysages du monde d’avant la civilisation industrielle. Le Mas de Fourques, près de Lunel, demeure pour lui un lieu d’ancrage et d’active méditation sur le monde. La série des Porteuses de paysage (1979), montre une extrême stylisation liée à cette narration sous-jacente et permanente d’un monde différent, à la fois semblable au nôtre, mais pas entièrement. Enfin quelques grands formats de Vincent Bioulès servent d’illustration à la relation forte entretenue entre les deux créateurs, d’une génération différente mais complices.

 

 

Jean Hugo, "Les Porteuses de paysage",1979, exposition Musée Paul Valéry, Sète, 2024. 

  Un voyage muséal à travers le temps et la peinture qui présnete des aspects inattendus de l’artiste dans ce 20ème siècle si tourmenté. Une écologie du regard également, paradoxalement en avance sur l’époque moderniste des Trente Glorieuses qui allait essayer de détruire tous les génies du lieu.


                                                                                                                                  Christian Skimao

 

 

 

 

Christian Skimao

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