Fondation
Vincent van Gogh, Arles
Exposition
Van Gogh et les étoiles
(pour
les 10 ans de la Fondation)
Du 1er
juin au 8 septembre 2024
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| Daniel Tremblay. Sans titre (Pisseur en l'air), 1981. |
Regarde avec les stars
Dix ans déjà. Un
anniversaire demeure un événement à célébrer dans la joie, mais aussi avec des
bougies sur un gâteau. Elles deviennent des étoiles pour accompagner cette
manifestation internationale et locale qui se déroule autour d’un tableau de
Van Gogh, la fameuse Nuit étoilée sur le Rhône, réalisée en septembre
1888 à Arles. Il a été prêté exceptionnellement par le musée d’Orsay. Ainsi, 75
artistes forment une galaxie autour de ce légendaire 76ème,
éclairant d’un jour nouveau et différent les rapports tant artistiques que
scientifiques, de différentes époques, allant par ordre alphabétique de
Juliette Agnel à George Frederic Watts, en passant par Tony Cragg, Gloria Friedmann,
Anselm Kiefer, Meret Oppenheim, Odilon Redon, etc. Bice Curiger et Jean de Loisy,
commissaires d’exposition, signent une monstration spatiale, à la fois
éclectique, didactique, et même poétique.
7 chapitres permettent de naviguer dans cette
mer étoilée comme suggéré par le catalogue : « Ténèbres » (I), « Firmament »
(II), « Cosmos » (III), « L’atelier de l’astronomie » (IV),
Lumières dans la ville » (V), « Les spirales du ciel » (VI), « Observatoires
sacrés & chemins de l’âme » (VII) ; parcourons-les de façon
aléatoire avec quelques œuvres significatives.
Commençons avec Le Portrait de Novalis
(1943) de Victor Brauner qui nous entraîne dans la mouvance si singulière de ce
surréalisme roumain, français et juif. Ce dessin à la bougie présente le grand
poète allemand en position de voyant, regardant conjointement un soleil et un
croissant de lune. Une vision intérieure réalisée avec peu de moyens dans cette
France occupée où la magie continue de briller malgré tout.
Daniel Tremblay et son installation Sans
titre (Pisseur en l’air) (1981) où une silhouette émet un jet
d’étoiles qui monte aux cieux avant de retomber sur terre. Cet artiste, mort
trop jeune à 35 ans d’un accident de voiture en 1985, demeure éternellement
« un prince des étoiles ». Un beau clin d’œil où la trivialité
apparente de l’acte nous entraîne dans la magie des sphères. Une grande émotion
nous saisit à chaque présentation d’une de ses compositions.
Félicie d’Estienne d’Orves explore le cosmos
depuis bien longtemps déjà avec beaucoup de talent. Sa série Light DNA – Cassiopée
A, Kepler et Tycho (2019) a été réalisée en collaboration avec
l’astrophysicien Fabio Acero. Trois œuvres composées à partir des données
spectométriques de trois supernovae. Les couleurs correspondent aux éléments
chimiques comme le néon, le magnésium, le silicium, le souffre, etc. Lui répond
une très intrigante installation d’Alicja Kwade, Superheavy Skies (2022)
où des blocs de pierre se trouvent maintenus dans l’espace par une fragile
armature mobile en métal. La science et la poésie finissent par se rejoindre
dans une interrogation réciproque.
Poursuivons avec une sorte de talisman créé
par l’écrivain Raymond Roussel, Etoile cosmique (1923). Lors d’un déjeuner
chez Camille Flammarion, l’écrivain s’empare d’un petit biscuit en forme
d’étoile et le conserve dans une boîte d’agent à couvercle de cristal, accompagné
d’une note manuscrite expliquant le contexte. Georges Bataille, autre grand
écrivain, retrouvera l’objet lors d’un marché aux puces et l’offrira à Dora
Maar. Des astres au ciel en passant par une friandise étoilée, naît un bijou conceptuel.
Surgissent deux grandes dames de la peinture
américaine. L’incontournable Georgia O’Keffe et son énigmatique Starlight
Night, Lake George (1922), qui apparaît comme une sorte de clin d’œil à Van
Gogh, mais dans le cadre d’un silence assourdissant. Et l’immense Helen Frankenthaler
avec Star Gazing (1989) qui nous interroge sur la perception des étoiles
face aux éclairages urbains. C’est dans cet apparent chaos que prend place cet univers
aqueux et mouvant, fort éloigné d’un titre voulu très littéral. L’infini se trouve
au bout de la périphérie.
Dans le cadre des spirales, se trouvent retenues
deux œuvres historiques italiennes. L’une de Giacomo Balla pour la période
héroïque du Futurisme, Il pianeta Mercurio passa davanti al sole (1914),
vision à la fois réelle mais aussi spirituelle liée à l’énergie vitale ;
l’autre de Lucio Fontana intitulée Concetto spaziale (1951), huile et
sable sur toile trouée, proprement magique.
Enfin dans l’avant-dernière salle du haut,
une grande installation de Mariko Mori, Miracle (I-VIII) de 2001 qui suggère
un monde sans début ni fin. Reprenant la théorie bouddhiste de la
réincarnation, elle nous place devant une réflexion philosophique soutenue par ses
tondos cosmiques.

Alicja Kwade.Superheavy Skies , 2022. Acier inoxydable poli miroir, pierres et moteur.
Et toutes les autres œuvres non évoquées ici…
Finalement, ne serions-nous pas, à un certain
niveau, nous aussi, les enfants des étoiles ?
Christian Skimao

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