mardi 25 février 2025

"Metempsychosis" d’Ivana Bašić, MO.CO Panacée, Montpellier, 2025

Exposition Metempsychosis d’Ivana Bašić (Saison Art et Science)

MO.CO Panacée, Montpellier, du 15 février au 18 mai 2025

 

 

Ivana Bašić, Passion of Pneumatics, 2020-2024. MO.CO. Panacée, 2025.© Ivana Bašić. Courtesy de l’artiste. Photo : Marc Dommage.

                         

          Plongée dans les profondeurs de l’être

 

 

 

  Ivana Bašić, artiste d’origine serbe, née en 1986 à Belgrade, vit et travaille à New York aux États-Unis. Son exposition à la Panacée qui suit celle du Schinkel Pavillon de Berlin en 2024 comprend plus d’une vingtaine d’œuvres, dont certaines monumentales. Le traumatisme subit par l’artiste dans son adolescence, durant la guerre qui a conduit à la dislocation de la Yougoslavie, demeure en arrière-fond de son approche.

La première œuvre visible, Passion of Pneumatics (2024), s’étend sur presque sept mètres de long. La référence au Cœur immaculé de la Vierge Marie dans la peinture italienne de la Renaissance se trouve transposée ici en un martèlement de marteaux pneumatiques sur une pierre qui doit devenir poussière. Les mouvements de ces derniers se trouvent synchronisés avec la cadence de respiration de la créatrice, faisant ainsi référence au « pneuma », en grec ancien, le souffle. Cette notion évoque également l’esprit ou l’âme dans une acception philosophico-religieuse. L’ensemble de la structure se compose de matériaux en acier inoxydable, mais aussi de cire, de verre soufflé, d’albâtre rose qui donnent naissance à des formes difficiles à définir, comme des fluides utérins ou des corps d’insectes. Comme le dit Ivana Bašić : « Chaque sculpture est une réflexion sur la transformation et la continuité de l'âme. J'utilise une variété de matériaux pour créer des pièces qui sont à la fois visuellement saisissantes et conceptuellement riches. »

  La matérialité même des œuvres ouvre sur un champ spirituel assez foisonnant. D’autres réalisations, moins imposantes, prennent place dans d’autres salles. La plupart du temps, on se trouve en présence d’entités en partie humaine et en partie proche des insectes, mais à chaque fois déclinés de façon différente. Si la référence formelle pouvait évoquer la créature du film Alien et surtout ses métamorphoses depuis sa naissance, Ivana Bašić introduit des organes intérieurs visibles qui symbolisent des fœtus ou des êtres en devenir. Une sculpture intitulée I had seen the centuries, and the vast dry lands; I had reached the nothing and the nothing was living and moist (2018-2024) représente une mante religieuse se transformant en chimère. Les pattes en inox portent une sorte de fœtus en transformation. La fixité des pièces laisse paradoxalement la porte ouverte à toutes les transformations.

  L’existence d’un baroquisme mâtiné de science-fiction a parfois lieu de surprendre. Cette plongée dans notre propre disparition, sans doute liée à notre potentielle renaissance, oblige à beaucoup d’humilité. Pourtant, les monstres physiques, saisissants par leur beauté trouble, ne sont rien par rapport à leurs doubles psychiques. L’art demeure toujours le vaste champ des questionnements existentiels.

                                                                                                                      Christian Skimao

                                                                                                                                  

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