Exposition Metempsychosis d’Ivana Bašić (Saison Art et Science)
MO.CO
Panacée, Montpellier, du 15 février au 18 mai 2025
Ivana Bašić, Passion of Pneumatics, 2020-2024. MO.CO. Panacée, 2025.© Ivana Bašić. Courtesy de l’artiste. Photo : Marc Dommage.
Plongée dans les
profondeurs de l’être
Ivana Bašić, artiste d’origine serbe, née en
1986 à Belgrade, vit et travaille à New York aux États-Unis. Son exposition à
la Panacée qui suit celle du Schinkel Pavillon de Berlin en 2024 comprend plus
d’une vingtaine d’œuvres, dont certaines monumentales. Le traumatisme subit par
l’artiste dans son adolescence, durant la guerre qui a conduit à la dislocation
de la Yougoslavie, demeure en arrière-fond de son approche.
La première œuvre
visible, Passion of Pneumatics (2024), s’étend sur presque sept mètres
de long. La référence au Cœur immaculé de la Vierge Marie dans la peinture
italienne de la Renaissance se trouve transposée ici en un martèlement de
marteaux pneumatiques sur une pierre qui doit devenir poussière. Les mouvements
de ces derniers se trouvent synchronisés avec la cadence de respiration de la
créatrice, faisant ainsi référence au « pneuma », en grec ancien, le
souffle. Cette notion évoque également l’esprit ou l’âme dans une acception philosophico-religieuse.
L’ensemble de la structure se compose de matériaux en acier inoxydable, mais
aussi de cire, de verre soufflé, d’albâtre rose qui donnent naissance à des formes
difficiles à définir, comme des fluides utérins ou des corps d’insectes. Comme
le dit Ivana Bašić : « Chaque sculpture est une réflexion sur la
transformation et la continuité de l'âme. J'utilise une variété de matériaux
pour créer des pièces qui sont à la fois visuellement saisissantes et
conceptuellement riches. »
La matérialité même des œuvres ouvre sur un
champ spirituel assez foisonnant. D’autres réalisations, moins imposantes, prennent
place dans d’autres salles. La plupart du temps, on se trouve en présence
d’entités en partie humaine et en partie proche des insectes, mais à chaque
fois déclinés de façon différente. Si la référence formelle pouvait évoquer la
créature du film Alien et surtout ses métamorphoses depuis sa naissance,
Ivana Bašić introduit des organes intérieurs visibles qui symbolisent des
fœtus ou des êtres en devenir. Une
sculpture intitulée I had seen the centuries, and the vast dry lands; I had
reached the nothing and the nothing was living and moist (2018-2024) représente
une mante religieuse se transformant en chimère. Les pattes en inox
portent une sorte de fœtus en transformation. La fixité des pièces laisse
paradoxalement la porte ouverte à toutes les transformations.
L’existence d’un baroquisme mâtiné de science-fiction a parfois lieu de surprendre. Cette plongée dans notre propre disparition, sans doute liée à notre potentielle renaissance, oblige à beaucoup d’humilité. Pourtant, les monstres physiques, saisissants par leur beauté trouble, ne sont rien par rapport à leurs doubles psychiques. L’art demeure toujours le vaste champ des questionnements existentiels.
Christian Skimao
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