lundi 3 mars 2025

Exposition Sigmar Polke, Fondation Vincent van Gogh, Arles, 2025

 

Exposition Sigmar Polke

Sous les pavés, la terre

Fondation Vincent van Gogh, Arles

Du 1er mars au 26 octobre 2025

 

 


Sigmar Polke, Atemkristall, 1977, 280 x 350 cm. Collection Speck, Cologne.©The Estate of Sigmar Polke, Cologne. Adagp, Paris, 2025. Photo Frank Sperling.


 

                       Une boulimie d’images


 

  L’exposition Sigmar Polke (1941-2010), représente un grand moment pour la Fondation Van Gogh, mais aussi pour Bice Curiger, qui a connu l’artiste depuis 1974. Elle organise ici, en compagnie de Margaux Bonopera, un vaste panorama des productions tant plastiques que photographiques du grand artiste allemand, achevant le circuit de visite avec un film qui présente sa dernière œuvre, les vitraux en agate et tourmaline de la Grossmünster de Zurich.

  Né en Silésie allemande, Polke est arrivé en RFA en 1953, après avoir fui la RDA avec ses parents, comme bon nombre de futurs artistes de sa génération, dont Gerhard Richter. Il va commencer une formation de peintre sur verre dans le domaine du vitrail, avant d’intégrer la fameuse Kunstakademie de Düsseldorf.

   Rien ne se perd, tout se transforme chez Polke, comme en témoigne Kartoffelhaus (Maison aux pommes de terre), 1967-1990, qui résonne avec les toiles de Van Goh, Travail des champs et Panier de pommes de terre, datées de 1885. Ce tubercule, à la fois symbolique et réel, flirte avec l’Arte Povera au niveau de la cabane, tout en s’inscrivant dans une contestation du Pop art américain au travers de cette « matérialité » grise de l’après-guerre en Allemagne. Une toile comme Atemkristall (Cristal d’un souffle) de 1997, titre d’un poème de Paul Celan, nous entraîne vers une fragmentation et une superposition des images donnant naissance, avec l’apparition d’un dessin enfantin, à une complexité ambiguë. L’utilisation d’une résine synthétique et feuille d’or sur polyester, montre l’interpénétration de référents anciens et d’une modernité en devenir.

  Si Polke a expérimenté une grande variété de matériaux et de techniques, souvent utilisées différemment dans le monde la peinture, il a voulu se propulser vers un ailleurs multidirectionnel, mais en deux dimensions. Klavier (Piano), 1982-1986, réalisée avec de la résine synthétique, du pigment et de la laque sur tissu, lui permet d’opérer une déstructuration de l’image. Flüchtende (Fugitifs) 1992, deux personnes en train de franchir le Mur à Berlin, donc une œuvre à la fois politique et personnelle, se sert d’une photographie pour aboutir à une toile à l’acrylique et résine sur tissu. Prêtée par Carré d’Art à Nîmes, elle met également en lumière le travail de Guy Tosatto, ancien et brillant conservateur de ce lieu, qui a ensuite beaucoup contribué à défendre le travail de Polke au musée de Grenoble.

Sigmar Polke. Palermo, Les catacombes,1976. Ensemble de cinq photographies uniques, 105x85 cm chaque. Coll. Sandra Alvarez de Toledo, Paris.©The Estate of Simar Polke, Cologne/ AdagpParis, 2025.



  Beaucoup de photographies montrent la volonté de l’artiste d’exploser et d’explorer ce medium. Des coulures apparaissent sur les clichés, d’autres souffrent de surexposition, de cadrages plus ou moins improvisés, etc. Disons que tous semblent en cours de métamorphose. La série, fort rare de Palermo, Les catacombes, 1976, ensemble de cinq photographies uniques représentant des cadavres momifiés, en habits de ville, frappe par la puissance qui s’en dégage et ouvre sur un espace surnaturel où l’art devient une sorte de révélateur. Enfin des vidéos se trouvent au dernier étage, avec divers moments de la vie de l’artiste en un tourbillon, à la fois privé et artistique. Tout dans cette superbe exposition, montre le foisonnement et la continuelle recherche d’un artiste intranquille, toujours sur la brèche.

 

                                                                                                                              Christian Skimao

 

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