Exposition Sigmar Polke
Sous les pavés, la terre
Fondation Vincent van Gogh,
Arles
Du 1er mars au 26
octobre 2025
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Sigmar Polke, Atemkristall, 1977, 280 x 350 cm. Collection Speck, Cologne.©The Estate of Sigmar Polke, Cologne. Adagp, Paris, 2025. Photo Frank Sperling. |
Une
boulimie d’images
L’exposition Sigmar Polke (1941-2010), représente
un grand moment pour la Fondation Van Gogh, mais aussi pour Bice Curiger, qui a
connu l’artiste depuis 1974. Elle organise ici, en compagnie de Margaux
Bonopera, un vaste panorama des productions tant plastiques que photographiques
du grand artiste allemand, achevant le circuit de visite avec un film qui
présente sa dernière œuvre, les vitraux en agate et tourmaline de la Grossmünster
de Zurich.
Né en Silésie allemande, Polke est arrivé en
RFA en 1953, après avoir fui la RDA avec ses parents, comme bon nombre de
futurs artistes de sa génération, dont Gerhard Richter. Il va commencer une
formation de peintre sur verre dans le domaine du vitrail, avant d’intégrer la fameuse
Kunstakademie de Düsseldorf.
Rien
ne se perd, tout se transforme chez Polke, comme en témoigne Kartoffelhaus (Maison
aux pommes de terre), 1967-1990, qui résonne avec les toiles de Van Goh, Travail
des champs et Panier de pommes de terre, datées de 1885. Ce tubercule,
à la fois symbolique et réel, flirte avec l’Arte Povera au niveau de la cabane,
tout en s’inscrivant dans une contestation du Pop art américain au travers de
cette « matérialité » grise de l’après-guerre en Allemagne. Une toile
comme Atemkristall (Cristal d’un souffle) de 1997, titre d’un
poème de Paul Celan, nous entraîne vers une fragmentation et une superposition des
images donnant naissance, avec l’apparition d’un dessin enfantin, à une
complexité ambiguë. L’utilisation d’une résine synthétique et feuille d’or sur
polyester, montre l’interpénétration de référents anciens et d’une modernité en
devenir.
Si Polke a expérimenté une grande variété de
matériaux et de techniques, souvent utilisées différemment dans le monde la
peinture, il a voulu se propulser vers un ailleurs multidirectionnel, mais en
deux dimensions. Klavier (Piano), 1982-1986, réalisée avec de la
résine synthétique, du pigment et de la laque sur tissu, lui permet d’opérer
une déstructuration de l’image. Flüchtende (Fugitifs) 1992, deux
personnes en train de franchir le Mur à Berlin, donc une œuvre à la fois politique
et personnelle, se sert d’une photographie pour aboutir à une toile à
l’acrylique et résine sur tissu. Prêtée par Carré d’Art à Nîmes, elle met également
en lumière le travail de Guy Tosatto, ancien et brillant conservateur de ce
lieu, qui a ensuite beaucoup contribué à défendre le travail de Polke au musée
de Grenoble.
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Sigmar Polke. Palermo, Les catacombes,1976. Ensemble de cinq photographies uniques, 105x85 cm chaque. Coll. Sandra Alvarez de Toledo, Paris.©The Estate of Simar Polke, Cologne/ AdagpParis, 2025. |
Beaucoup de photographies montrent la volonté de l’artiste d’exploser et d’explorer ce
medium. Des coulures apparaissent sur les clichés, d’autres souffrent de surexposition,
de cadrages plus ou moins improvisés, etc. Disons que tous semblent en cours de
métamorphose. La série, fort rare de Palermo, Les catacombes, 1976, ensemble
de cinq photographies uniques représentant des cadavres momifiés, en habits de
ville, frappe par la puissance qui s’en dégage et ouvre sur un espace surnaturel
où l’art devient une sorte de révélateur. Enfin des vidéos se trouvent au
dernier étage, avec divers moments de la vie de l’artiste en un tourbillon, à
la fois privé et artistique. Tout dans cette superbe exposition, montre le
foisonnement et la continuelle recherche d’un artiste intranquille, toujours
sur la brèche.
Christian
Skimao
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