Exposition Daniela Montecinos
Dans le cadre du Off du Festival du
dessin
Saillies graphiques. Dessins
Aux Docks d’Arles , galerie d’art ,
Arles
Du 11 au 25 avril 2025
Contours voyageurs
Les dessins de Daniela Montecinos racontent
son monde et racontent le monde. Si sa source d’inspiration apparaît semblable
à celle de ses toiles (l’exil, la révolte contre l’injustice, les figures d’un
cinéma déjà passé, le vécu personnel, l’enfance, etc.), l’utilisation du medium
dessin ouvre la porte à une approche paradoxalement plus brutale et plus
subtile. Le tracé du crayon suivrait la trace des pas d’une voyageuse qui
circule entre les continents (Amérique-Europe et vice-versa) et les histoires
qui en découlent. Loin de faire du passé, table rase, l’artiste l’orchestre à
nouveau dans un récit contemporain qui nous emporte dans son tourbillon.
Les techniques utilisées diffèrent en
fonction du propos : un dessin traditionnel dans le cadre d’un champ
figuratif ou parfois un éclatement de la représentation au travers d’un
tachisme de circonstance. Les personnages, parfois flous et vibrionnants, jouent
avec l’effet du mouvement comme dans certaines recherches cinétiques. Mais il
s’agirait plutôt de mettre en avant mouvement et immobilisme, les deux cohabitant
dans un espace-temps difficile à définir exactement. Ainsi fonctionne un diptyque
de grand format intitulé Crossing Borders avec des silhouettes de chiens
et chats qui se trouvent en contact avec des pinceaux et des silhouettes.
L’artiste présente à la fois l’œuvre en train de se faire et le passage vers un
ailleurs (meilleur, forcément meilleur) où s’engage une silhouette portant un
lourd bagage sur sa tête. Il ne s’agit ni d’exotisme, ni de complaisance de
circonstance comme nous en voyons de temps à autre, mais d’une grande empathie
de la part de l’artiste avec celles et ceux qui doivent fuir. La force de la
narration que l’on rencontrait déjà dans sa production de toiles se conjugue
ici avec une sorte d’urgence. Si la thématique de l’exil, même intérieur, résonne
comme une évidence, d’aucuns préfèrent d’illusoires enracinements, parfois inventés
la veille, par crainte de l’altérité.
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Daniela Montecinos, Dessins, vue partielle, 2025 |
Daniela Montecinos pratique donc un art du
dessin où l’allusif le dispute au figuratif. Du texte prend aussi place dans
ses valises, frappées de vignettes qui mettent en abyme d’autres scènes. L’espace
tragique du monde se pare de l’élégance de sa dénonciation au travers de ce que
l’on nommerait son style. Comme dans ses peintures qui optent pour une
référence cultivée à l’histoire de l’art, l’artiste explore ces territoires
mentaux en y apportant sa science du dessin. Les tracés des histoires intimes
se retrouvent dans les enjeux de l’Histoire ; chez elle n’existe aucun sentimentalisme
de pacotille, mais une vibrante nostalgie qui irrigue la totalité de sa
production.
Christian
Skimao
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