jeudi 8 mai 2025

Expositions Lucas Arruda et Ivens Machado, Carré d'Art, Marina Rheingantz, Beaux-Arts, Nîmes, 2025

 

Expositions Deserto-Modelo de Lucas Arruda et Ivens Machado

Dans le cadre de la Saison du Brésil en France

Carré d’art-Musée d’art contemporain, Nîmes

Du 30 Avril au 5 octobre 2025

Avec un volet complémentaire

Exposition Mirage de Marina Rheingantz

Musée des Beaux-Arts, Nîmes

Du 30 Avril au 5 octobre 2025

 

 

Lucas Arruda, Untitled (from the Deserto Modelo series), 2019. Vue partielle en 2025.

             Un Brésil contemporain aux multiples facettes

 

 

 Les œuvres de Lucas Arruda, né en 1983 à São Paulo, occupent tout le second étage. De nombreuses peintures, de petits formats, questionnent la notion de paysage grâce à un long travail de couches et de reprises jusqu’à aboutir à un point de tension entre abstraction et figuration. L’utilisation de formats horizontaux pour les marines et de formats verticaux pour les jungles reprend, en apparence, des critères traditionnels. Son exploration d’un monde lié à l’impressionnisme, au sens, non pas historique mais sensitif (n’expose-t-il pas en ce moment même au musée d’Orsay à Paris, en écho à des peintures de Claude Monet) dans le cadre d’une expérience contemporaine, a souvent de quoi surprendre. Le titre Deserto-Modelo reprend un vers du grand écrivain João Cabral de Melo Neto (1920-1999) comme titre de l’ensemble de sa production en devenir. La notion de voyage et de quête se situe à la fois dans l’œil du regardeur, mais aussi dans la pensée très conceptuelle du créateur. Ainsi en va-t-il de l’installation Untitled (2019), qualifié par l’artiste d’ « idéogramme de paysage » où un carré de lumière se trouve projeté au-dessus d’un carré peint sur le mur. Après cette recherche d’infini, l’étrange vidéo finale, Neutral Corner (2018) utilise les images en noir et blanc, d’un réel combat de boxe entre Emile Griffith et Benny Parret au Madison Square Garden de New York en 1962. Ce dernier mourra de ses blessures dix jours plus tard. Le tragique, les corps, le sexe, enfin la chute de Parret et les tracés des cordes du ring nous offrent une sorte d’épure d’un réel, stylisé et connoté.

 

Ivens Machado, Untitled, 1990. Bois et gravier.Vue d'exposition en 2025.

   Au Project Room, premier étage du musée, se trouve une sélection d’œuvres d’un artiste historique, Ivens Machado, né à Rio de Janeiro en 1942 et disparu en 2015. La vidéo évoquée précédemment pourrait servir de lien formel avec celles de Machado. Travaillant sur les corps noir et blanc, comme dans Versus (1974), il met en avant la violence et le racisme sous-jacent dans le Brésil de ces années-là. L’utilisation de bandages dans ses performances propose un corps blessé et en voie de restauration. Enfin, d’intéressantes sculptures prennent place, dont sa chaussure-pied-langue datée de 1990, qu’il reconfigure et change d’échelle. Là encore, ses volumes évoquent souvent des corps, certes stylisés et souvent très éloignés d’une simple figuration. L’utilisation de matériaux bruts et liés au monde industriel de la construction (fer, verre, béton, débris, etc.) crée un effet poétique inattendu. Ne leur donnant pas toujours de titres et optant pour une dénomination générique d’Untitled, excepté Painel de Azulejos (1983), où l’organique rejoint le narratif, l’artiste a été influencé par l’Arte Povera en Italie. Ainsi ses formes réalisées avec du béton renforcé et des tessons de tuiles (2002) donnent une épaisseur liée à une dangerosité visuelle, conjuguant avec talent, poétique et politique.

 

Marina Rheingantz, Rabetao de Ouro, 2019. Vue d'exposition en 2025.


    L’exposition Mirage de Marina Rheingantz au Musée des Beaux-Arts nous offre une autre approche picturale. Née également en 1983, à Araraquara, elle travaille à São Paulo. Elle a exposé en France en 2021 au Frac Auvergne. Ses peintures se fondent temporairement dans la collection du musée. La plus imposante, au rez-de-chaussée, Rabetão de Ouro (2019) focalise toute l’attention sur elle avec ses couches plus ou moins opaques parsemées d’amas colorés de matière. Une sorte de mise en scène qui joue aussi avec des effets de tapisserie au niveau des motifs. Rien n’est véritablement abstrait et pourtant rien n’est figuratif non plus. Dans cet entre-deux de la peinture, l’esprit oscille constamment, pénétrant dans un univers onirique. À l’étage, une série de Duos, permet un dialogue entre hier et aujourd’hui, entre La Vierge et l’Enfant Jésus entourés de deux anges de Maestro Asiguo (15ème siècle) et Madona (2025) de Marina Rheingantz. Le déplacement opère à la fois temporellement, structurellement et spatialement, multipliant l’intérêt pour les deux peintures.

 

 

                                                                                                                                                        Christian Skimao

 

 

 

 

 

 

 

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